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Conseil de l’Innovation & Rapport sur les aides à l’innovation

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Un conseil pour orienter de manière éclairée les choix stratégiques du gouvernement en matière d’innovation.

Le 18 juillet dernier, Bruno LEMAIRE (Ministre de l’Economie et des Finances) et Frédérique VIDAL (Ministre de l’Enseignement Supérieur de la Recherche et de l’Innovation), présidaient la séance inaugurale du Conseil de l’Innovation. Cette instance est destinée à orienter l’action du Gouvernement pour le pilotage stratégique de ses décisions liées à l’innovation, et plus précisément :

  • définir les orientations et priorités de la politique d’innovation ;
  • décider des mesures de renforcement de la transversalité de cette politique et de la simplification du paysage des aides à l’innovation ;
  • formuler des recommandations sur les moyens financiers à dédier à cette politique, pour favoriser l’émergence et l’industrialisation d’innovation de rupture.

Un rapport fondateur pour l’installation du Conseil

La séance d’installation de ce Conseil a permis de remettre aux Ministres un « Rapport sur les aides à l’innovation » établi par un collectif composé de personnalités représentatives des instances publiques et privées liées aux politiques d’innovation en France : Jacques LEWINER (Directeur scientifique honoraire de l’ESPCI Paris), Ronan STEPHAN (Directeur scientifique de PLASTIC OMNIUM), Stéphane DISTINGUIN (Président de FABERNOVEL) et Julien DUBERTRET (Inspecteur Général des Finances Publiques).

Ce rapport a été l’occasion d’établir un tour d’horizon des forces et faiblesses du système d’aide à l’innovation en France, et d’émettre 55 propositions d’amélioration de celui-ci. Ces propositions ont – pour certaines – servi de base à l’orientation des priorités du Conseil de l’Innovation, et reposent sur un principe : éviter l’enlisement « dans une peur de l’avenir dissimulée derrière un esprit procédurier dont le sens devient toujours moins perceptible ».

Ce rapport peut être considéré comme fondateur de l’action du Conseil de l’Innovation, en ce qu’il a directement inspiré les trois priorités de ce dernier (cf. ci-dessous), et que 38 des 55 mesures qu’il propose sont déjà en cours de mise en œuvre.

Les priorités du Conseil de l’Innovation

1 – Soutenir l’innovation de rupture

Deux grands défis sont retenus à l’inauguration du Conseil : « Comment améliorer les diagnostics médicaux par l’intelligence artificielle ? » et « Comment sécuriser, certifier et fiabiliser les systèmes qui ont recours à l’intelligence artificielle ? »

2 – Simplifier le paysage des aides à l’innovation

3 – Accélérer la croissance des entreprises par l’innovation

Des mesures d’ores et déjà en chantier en ce qui concerne les projets collaboratifs et les aides directes

Les priorités fixées au Conseil de l’Innovation traduisent le fait que, en matière de projets collaboratifs et d’aides directes, bon nombre des propositions du rapport sont mises en chantier dès son installation.

1. Aides aux projets collaboratifs

Le rapport a développé 4 sujets en ce qui concerne les projets collaboratifs :

  • Garantir la continuité de l’effort de financement

Les effets de frein puis d’accélération des dotations ont démontré un impact sur l’efficience des dispositifs, avec des effets durables. Ainsi, le budget des aides à l’innovation BPI doit être préservé, et un 4ème Programme d’Investissements d’Avenir (PIA) doit d’ores et déjà être réfléchi, en reposant sur l’analyse d’impact des précédents programmes. Les programmes devront également repenser leurs processus d’évaluation / sélection et de gestion trop lents et trop complexes.

AVIS D’EXPERT : Cette proposition apporte une visibilité à moyen-long terme des programmes internes d’innovation (qui s’inscrivent souvent dans la durée), et de l’innovation collaborative en partenariat avec les institutions publiques.

  • Identifier en continu les obstacles non financiers à l’innovation,

et ainsi y remédier de manière à améliorer les performances d’innovation.

AVIS D’EXPERT : Les délais de traitement des demandes de subvention seraient raccourcis, et des solutions concrètes aux problématiques de Propriété Industrielle et de création d’entreprise pourraient être apportées.

  • Créer un Fonds pour l’Innovation et l’Industrie (FII),

Celui-ci vise à répondre à la nécessité de générer de l’innovation de rupture, donc risquée ! Les projets devront être portés par un défi, soit thématique, soit technologique (citons notamment l’énergie, les mobilités, l’intelligence artificielle, …). A contrario, le rapport préconise de ne pas retomber dans un fléchage des aides en fonction de secteurs économiques.

AVIS D’EXPERT : Cette proposition aide nos entreprises (au travers de subventions ou de dérisquage partiel au travers d’un fonds co-abondé) à franchir la vallée de la mort, aujourd’hui partiellement couverte par les financements publics avec des moyens d’action faibles comparativement aux besoins.

  • Simplifier l’accès aux aides et aux structures dédiées à l’innovation,

en rassemblant l’information et en rationalisant les accès : « une aide, un guichet », et un rapprochement des programmes similaires.

AVIS D’EXPERT : Un paysage plus lisible, des rôles mieux définis et des processus de sélection plus transparents.

2. Aides individuelles

  • Soutenir les innovations de rupture

Un axe majeur du travail du Conseil de l’Innovation sera de favoriser l’émergence de secteurs d’avenir, et donc de soutenir l’innovation de rupture. Ainsi, la croissance et l’émergence des start-ups technologiques via

  • le plan « deep tech » et l’introduction de nouveaux financements :
    • revalorisation de la bourse French Tech Emergence, avec un montant maximum pouvant aller jusqu’à 90 k€,
    • augmentation de la dotation des concours (notamment I-Lab : + 15 M€ / an),
    • renforcement des aides individuelles à la R&D à hauteur de 45 M€ / an ;
  • création du dispositif « French Tech Seed » de 400 M€ (fonds d’investissement).
  • Simplifier le paysage des aides à l’innovation

 Pour engager le travail de simplification des aides à l’innovation, le Conseil travaille sur deux points :

  • le renforcement de l’articulation des concours (I-Lab et Concours d’innovation), en animant une communauté de lauréats ;
  • un accroissement de la lisibilité des aides, avec une communication plus claire de chaque aide et leur articulation.

Un avenir plus flou pour les aides indirectes ?

Cependant, en matière d’aides indirectes (CIR / CII / JEI), on ne peut que constater le relatif mutisme du Conseil de l’Innovation à son installation, et ce alors que le « Rapport sur les aides à l’innovation » émettait les propositions suivantes les concernant :

Concernant le CIR

Le rapport pointe principalement les délais d’instruction des demandes de remboursement par l’administration fiscale (de 6 à 9 mois), et propose d’améliorer le pilotage de ces délais pour le ramener à 4 mois en moyenne.

AVIS D’EXPERT : Ayming constate un délai moyen de 9 mois pour le traitement des demandes de remboursement CIR. La proposition du rapport va bien entendu dans le bon sens. Pour s’assurer un pilotage rigoureux souhaité par les auteurs, une solution pourrait consister à valider automatiquement la demande au terme du délai de 4 mois en l’absence d’instruction de la demande.

Les auteurs du rapport mettent également en exergue les difficultés des entreprises du secteur numérique à distinguer les opérations éligibles au CIR dans leur domaine. Il en résulte une appréhension des sociétés à utiliser le CIR, d’une part, et la crainte du redressement lorsqu’il est utilisé, d’autre part. Face à cela, le rapport propose la création d’une section spécifique dans le guide du CIR.

AVIS D’EXPERT : La difficulté liée à l’éligibilité du CIR dans le domaine du numérique est une réalité, bien que le BoFip expose déjà des exemples précis d’activités éligibles dans le numérique. A notre sens, le verrou à ce niveau se situe plus certainement dans l’appréciation des projets numériques par le Vérificateur au cours du contrôle fiscal et non à l’information du Contribuable sur la définition des opérations éligibles.

Concernant le CII

Les conclusions émises par les rapporteurs relatent la porosité des dépenses éligibles entre les dispositifs CIR et CII et la différence des taux applicables (respectivement 30 % et 20 %), qui amènent le Contribuable à arbitrer le fléchage des dépenses entre les deux dispositifs. Consécutivement, il est proposé d’homogénéiser les taux à 30 %.

AVIS D’EXPERT : Il est intéressant de proposer un taux unique pour les deux dispositifs. Gageons que cette proposition soit favorable au Contribuable et à l’attractivité du CII. Un pas supplémentaire de simplification du CII pourrait consister à étendre son éligibilité aux innovations de services, procédés, organisation et commercialisation. En effet, la seule éligibilité des biens corporels et incorporels de produits nouveaux rend complexe l’appréhension du CII par les entreprises.

Concernant la JEI

Trois propositions sont émises :

  • allonger le statut de 8 à 10 ans ;
  • supprimer l’exonération fiscale d’Impôt sur les sociétés pour le concentrer sur les exonérations sociales ;
  • élargir les dépenses pour le calcul du seuil d’accès à la JEI aux dépenses éligibles au CII et non plus uniquement celles éligibles au CIR.

AVIS D’EXPERT : Les trois propositions émises par les rapporteurs nous semblent favorables, en ce qu’elles correspondent à la réalité des sociétés prétendant au statut de JEI : des sociétés qui ne font pas uniquement de la R&D mais aussi de l’innovation, qui ont besoin d’être soutenues sur un cycle de développement supérieur à 8 ans, et plus sensibles aux exonérations sociales que fiscales.

En l’absence de commentaire du Conseil de l’Innovation sur ces dispositifs, nous pourrions donc croire à la stabilité du CIR dans les prochaines années ? Peut-être … Gardons toutefois à l’esprit que la Commission Nationale d’Evaluation des Politiques d’Innovation (CNEPI) a lancé en juin 2016 un projet d’évaluation des effets du CIR, projet dont les conclusions qui devaient être rendues en avril 2018 se font toujours attendre. Il y a fort à parier que le tout nouveau Conseil de l’Innovation a joué la prudence, et attend ces conclusions pour se prononcer.
A suivre …

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