Podcast

La Voix des RH : Gestion des accidents du travail, obligations et bonnes pratiques pour les employeurs

Dans ce nouvel épisode de la voix des RH, nous allons aborder la gestion des accidents du travail du point de vue de l’employeur. Florence Bernier, juriste experte en droit social, et Gilles Scetbon, médecin coordinateur chez Ayming, apporteront leurs expertises pour vous aider à traiter ces incidents de manière efficace, tout en protégeant les intérêts de votre entreprise.

Au programme de cet épisode

Florence Bernier : Bonjour à tous, me voilà de retour sur La Voix des RH, que j’ai contribué à lancer l’année dernière. Depuis, les épisodes m’ont énormément plu parce que ce podcast est pointu et propose des leviers pratiques et actionnables.

Aujourd’hui, on va faire la même chose. On va aborder un sujet très complexe de droit social, mais on va essayer de le rendre un peu plus simple et surtout pratique pour les entreprises, les RH et les employeurs qui nous écoutent.

Pour ceux qui ne me connaissent pas, je suis Florence Bernier, juriste en droit social depuis une vingtaine d’années et créatrice de contenu sur LinkedIn, où j’essaie d’apporter un petit peu d’éclairage sur ce droit passionnant mais bien complexe. Aujourd’hui, pour aborder le sujet des accidents du travail, je suis avec Gilles, que je vais laisser se présenter.

Gilles Scetbon : Bonjour, je m’appelle Gilles Scetbon et je suis médecin. J’ai commencé une carrière de médecin généraliste avec un parcours un peu atypique, centré sur les pratiques de la médecine d’urgence, de la médecine du sport et de la nutrition. J’ai découvert un peu par hasard les intersections entre la médecine et le droit, ce qui m’a amené à connaître le droit pénal, la responsabilité médicale, l’assurance et les risques professionnels.

C’est comme ça que j’ai évolué vers la médecine d’expertise et la médecine de conseil. Je suis d’ailleurs médecin, notamment chez Ayming, depuis pratiquement dix ans.

Florence Bernier : Aujourd’hui, on va parler de l’accident du travail uniquement sous l’angle de l’employeur, c’est-à-dire quand il faut le déclarer, comment le déclarer, ce qu’il faut absolument faire ou ne pas faire pour protéger les intérêts de l’entreprise. Faut-il aussi forcément et toujours contester la reconnaissance d’un accident du travail ?

Je sais que tu vas nous apporter beaucoup sur ce sujet. Et on va commencer par une définition.

Alors rapidement, dis-moi Gilles, c’est quoi un accident du travail ?

Qu’est-ce qu’un accident du travail ?

Gilles Scetbon : Un accident du travail commence par un fait accidentel, qu’on appelle un fait générateur. Il doit être ponctuel et datable. Il entraîne des dommages et des lésions avec des conséquences physiquespsychologiques, ou les deux.

Florence Bernier : D’accord. Et à quoi peut servir de reconnaître un accident du travail ?

Tu me dis qu’un accident du travail est un fait accidentel qui génère des lésions. Finalement, est-ce que ça a un intérêt pour le salarié d’obtenir une déclaration d’accident du travail ?

Pourquoi et comment faire une déclaration d’accident du travail ?

Gilles Scetbon : En effet, le statut de reconnaissance de l’accident du travail permet de couvrir intégralement, dans la limite des tarifs conventionnés opposables, l’ensemble des soins et des consultations. Il permet également de maintenir le salaire et de verser une indemnité aux salariés qui conserveraient des séquelles à la consolidation, voire une rente. Enfin, il permet de percevoir une indemnité complémentaire s’il est établi que l’employeur a été défaillant dans les mesures de protection du salarié.

Florence Bernier : Dans ce cas précis, on va parler de faute inexcusable.

On n’en a pas parlé juste avant, mais sauf erreur de ma part, l’accident du travail survient dans des circonstances bien particulières, c’est-à-dire à un moment et dans un lieu où le salarié travaille.

Le cas particulier des accidents survenant pendant les heures de télétravail

Gilles Scetbon : Alors oui, les accidents qui surviennent en mission, par exemple chez des clients, sont aussi considérés comme des accidents du travail, dans la mesure où ils se produisent lors d’une mission effectuée par des travailleurs nomades.

Le télétravail est également une situation qui permet la reconnaissance d’un accident du travail, à condition que l’accident survienne pendant les heures de télétravail.

Une condition importante demeure : le salarié doit être bien subordonné à l’employeur.

Florence Bernier : Oui, c’est très intéressant.

Je pense que cela va générer une jurisprudence peut-être encore plus importante dans les prochaines années, car comme tu l’as très justement dit, à l’origine la définition nous parle du temps et du lieu de travail, mais aujourd’hui, qu’est-ce que représente exactement le temps de travail ?

Je pense notamment aux salariés en forfait jours.

Qu’en est-il du lieu de travail lorsque le salarié est en mission ou en télétravail chez lui ?

Tout cela va certainement engendrer pas mal de litiges. Aujourd’hui, il est clair que nous n’avons pas encore toutes les réponses.

Supposons qu’un salarié, dans une situation relativement simple quant au temps et au lieu de travail, ait un accident. Lorsque l’accident se produit, il le signale à son employeur.

Quel procédé suivre après le signalement d’un accident de travail ?

Florence Bernier : Quelles sont les premières actions que l’employeur doit entreprendre ? Quelle est la première étape ?

Gilles Scetbon : Tu as raison de commencer par la première étape.

La première étape consiste à informer l’employeur de la survenue de l’accident du salarié. En principe, le salarié doit informer l’employeur dans les 24 heures qui suivent l’accident.

Si cette information est transmise avec du retard, l’employeur pourrait légitimement remettre en question le caractère professionnel de l’accident.

Registre des accidents bénins : comment ça marche ?

L’employeur doit ensuite déclarer cet accident du travail. Il peut l’inscrire dans le registre des accidents bénins, si l’entreprise en dispose. Toutes les entreprises ne possèdent pas un tel registre, mais s’il existe, il peut être utilisé.

Il y a une condition essentielle : l’accident et ses conséquences doivent être mineurs, sans nécessité de soins ni d’arrêt de travail.

Attention, si par la suite le salarié estime nécessaire de consulter un médecin, de recevoir des soins ou de bénéficier d’un arrêt de travail, alors l’employeur doit faire une déclaration d’accident du travail.

Florence Bernier : Même si j’ai le droit d’avoir un registre des accidents bénins en entreprise et que j’ai décidé d’inscrire là, cet accident du travail, qui visiblement n’était pas grand-chose, dois-je faire une déclaration plus tard si le salarié me sollicite ?

Gilles Scetbon : Absolument.

La déclaration d’accident de travail doit suivre l’inscription au registre des accidents bénins si le salarié en fait la demande ou si des soins ou des arrêts de travail deviennent nécessaires, même de façon différée.

Florence Bernier : D’accord.

On peut se demander si dans certains cas cela ne fait pas doublon, puisqu’on l’inscrit dans le registre des accidents bénins et qu’on doit quand même faire une déclaration.

Je n’avais pas cette notion-là, de devoir finalement faire une déclaration même si initialement on avait jugé que l’accident tel qu’il nous a été déclaré ne justifiait pas d’en faire une.

Gilles Scetbon : Parfois, il y a des symptômes initiaux qui sont très frustres, parfois ce ne sont que de simples douleurs. A ce stade, tant le salarié que l’encadrement, pensent que tout cela va se résoudre très rapidement.

Cependant, les douleurs peuvent persister dans la durée et devenir plus intenses.

Évidemment, dans ces cas-là, on peut avoir besoin de consulter un médecin, de recevoir des soins voire d’être mis en arrêt de travail. Dans ce cas, il est impératif de déclarer l’accident du travail à la CPAM.

Notamment, lors de la déclaration d’accident du travail, l’employeur remettra au salarié un formulaire spécifique qui lui permettra de faire prendre en charge intégralement, dans la limite des tarifs conventionnés de la sécurité sociale, tous les soins dont il aura besoin.

Florence Bernier : Ce que tu nous disais tout à l’heure sur l’intérêt d’être reconnu en accident du travail, c’est la prise en charge des soins.

Si je ne dispose pas d’un registre des accidents bénins, est-ce que je dois faire une déclaration d’accident du travail à chaque fois qu’il y a un accident ? On est d’accord ?

Pour tous les accidents, même les plus modestes, même ceux qui semblent ne pas entraîner de conséquence immédiate.

Gilles Scetbon : Absolument, il peut être reproché à l’employeur de ne pas déclarer un accident de travail lorsque le salarié l’a informé de l’accident survenu pendant le temps et sur le lieu de travail.

Qu’est-ce qu’une réserve et comment l’employeur peut faire pour qu’elle soit utile ?

En revanche, l’employeur a la possibilité, s’il doute de la réalité de l’accident ou de son caractère professionnel, d’émettre des réserves.

Florence Bernier : Bien sûr, on va en parler, d’autant que ce que je vois, c’est qu’il faut que le salarié fasse sa déclaration, mais parfois, même pour des incidents extrêmement mineurs. Par exemple, le salarié se lève de son siège et ressent soudain une douleur au dos. Il sait qu’il doit déclarer l’accident, mais il peut avoir envie d’exprimer son point de vue à la Sécurité Sociale afin d’éviter que cet accident ne lui soit attribué.

Alors, on parle de réserves, un terme que je connais bien, mais je me suis rendu compte que je ne savais pas grand-chose sur leur utilisation.

Qu’est-ce qu’une réserve, à quoi ça sert et que peut faire l’employeur pour qu’elle soit utile ?

J’aurais tendance à ne pas séparer le mot « réserve » de « motivée ».

Découvrez les autres épisodes de La voix des RH

Partager