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Révision des valeurs locatives foncières : quels impacts en 2017 ?

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Tous à vos calculettes ! L’Administration vient de publier les nouveaux critères de calcul des valeurs locatives cadastrales des locaux professionnels qui, à partir du 1er janvier 2017, serviront de base aux impôts directs locaux (Taxes foncières, Cotisation foncière des entreprises, taxe d’enlèvement des ordures ménagères). 

Attention aux maux de tête ! Car pour la simplification des règles d’évaluation et la clarté des impositions, il faut encore attendre…

La RVL : une réforme nécessaire

La fiscalité locale repose sur un principe : celui de l’équité des impositions en fonction de la capacité contributive des redevables. Elle est appréciée à partir du loyer moyen qu’un propriétaire pourrait tirer de la mise en location de son bien. Pour autant la mise en application est loin d’être aussi simple !

L’ancien système mis en place par la révision générale de 1970 prévoyait des révisions périodiques tous les 3 ans selon la loi. Cependant la première actualisation n’a été réalisée qu’en 1980 suivie d’une succession de revalorisations annuelles forfaitaires identiques pour l’ensemble des territoires sans prise en compte des fluctuations réelles des marchés locatifs locaux. C’est pour cela que de nombreux élus déplorent depuis des années la déconnexion des bases d’imposition avec le marché locatif local actuel. Ils reprochent à ces bases de manquer de dynamisme et de créer des injustices entre les contribuables.

De son côté, l’Administration qui a en charge l’établissement des bases d’imposition, se heurte de plus en plus, à la délicate pirouette consistant à apprécier, aujourd’hui, le loyer qu’un immeuble aurait pu procurer à son propriétaire au 1er janvier 1970. Le nombre des éléments de comparaison (les locaux-types) qui ont survécu, sans changement depuis la fin des années 60, se réduisant comme peau de chagrin, la juste appréciation d’une valeur locative est devenue un exercice complexe et irréel. Et que dire des nouveaux types de bâtiment qui, n’existant pas en 1970 sont, tant bien que mal, évalués par comparaison à des locaux incomparables !

Bref, pour toutes ces bonnes raisons, et aussi pour réduire les contentieux introduits par de plus en plus de redevables, une révision générale des valeurs locatives est apparue nécessaire. Contrairement à la révision avortée de 1990, la révision prévue par la loi de finances rectificative du 29 décembre 2010 est en bonne voie d’aboutir, en dépit de reports successifs, pour 2017. En effet, les travaux préparatoires titanesques de traitement des informations collectées en 2013 auprès de tous les propriétaires de locaux professionnels ont été menés par les services des impôts entre fin 2013 et juin 2016. Cet été, l’Administration a enfin publié les grilles tarifaires des 38 catégories de locaux, les secteurs d’évaluation et les coefficients de localisation qui serviront à l’établissement des nouvelles bases d’imposition aux Taxes foncières et Cotisation foncière des entreprises en 2017.

Dans ce nouveau système, le principe d’équité des impositions en fonction de la capacité contributive des redevables est maintenu puisque la base d’imposition commune à tous les impôts directs locaux est et restera la valeur locative « cadastrale ». À partir de 2018, les grilles tarifaires seront actualisées annuellement à partir des loyers déclarés par les exploitants au moyen de la procédure « DECLOYER » déjà en œuvre depuis 2 ans.

L’objectif de rapprocher les valeurs locatives cadastrales des marchés locatifs locaux serait donc, au moins en apparence, en passe d’être atteint.

Analyse des données et premières tendances

Pour constituer une base d’étude des premières tendances, il a été nécessaire de collecter et d’organiser l’ensemble des données publiées en juin dernier par l’Administration.

L’analyse des quelque 500 000 lignes de données met en évidence une forte hétérogénéité des impacts. En revanche, l’analyse ciblée par type d’immeuble permet d’avoir une vision relative des impacts en fonction de la localisation. D’ores et déjà il en ressort des éléments surprenants.

Les différentes interprétations possibles des définitions des catégories et le classement des immeubles sera probablement une source d’incompréhension pour les redevables, avec des impacts très différents. À titre d’exemple, prenons les Restaurant inter-entreprises (RIE). Les consignes données par l’Administration fiscale sont de classer dans la catégorie MAG (Magasin-commerce) ces RIE même lorsqu’ils constituent une annexe secondaire d’un immeuble de bureaux. Ainsi, dans la commune de Saint-Denis (93), nous observons un doublement de la base d’imposition selon que le RIE a été déclaré en MAG ou en annexe de bureaux (BUR).

projets collaboratifs

Autre cas de figure particulièrement parlant, l’imposition des bureaux.

  • Contrairement aux idées préconçues de l’administration majorant systématiquement les bases d’imposition des bureaux récents par rapport aux bureaux anciens, les nouvelles grilles tarifaires montrent des tarifs plus élevés pour les anciens bureaux, dans certains départements comme le 78 ou le 95. Les bureaux récents apparaissent donc ici comme gagnants avec une taxation relativement plus faible.
  • En revanche, ces nouvelles grilles, par définition plus proches des marchés locatifs, permettent effectivement une meilleure prise en compte de la capacité contributive des redevables. C’est le cas pour des bureaux récents (BUR2) situés dans les Hauts-de-Seine (92), où l’amplitude des nouveaux tarifs varie de 1 à 3 selon les secteurs, alors que dans l’ancien système elle n’était que de 1 à 1,5.

De fait, dans le 92, les écarts entre les communes seront accentués et le niveau des taux d’imposition sera un critère déterminant sur les choix d’implantation. En effet, la comparaison entre lieux d’implantation n’est valable que si elle est faite en combinant les bases et les taux, comme le démontre le Baromètre du coût fiscal immobilier publié chaque année en novembre.

Des données à compléter

On se souvient qu’à l’automne 2015, le rapport présenté au Parlement par la Direction Générale des Finances Publiques (DGFIP) sur les simulations relatives à la révision des valeurs locatives des locaux professionnels, avait pointé des transferts de charges insupportables vers certaines catégories de locaux.

Ainsi les commerces en centre-ville, les petits magasins au sein des centres commerciaux, les locaux abritant des activités sanitaires et sociales, les maisons de retraite, les établissements d’enseignement, avaient été identifiés comme les grands perdants du système, avec des simulations à la hausse pouvant atteindre +100%. A l’inverse, les hypermarchés et les supermarchés seraient les grands gagnants, avec des baisses sur certains secteurs pouvant atteindre 30%.

Pour rendre la réforme acceptable, la loi de finances rectificative pour 2015 a apporté des aménagements à ce dispositif :

  • Confirmation de la généralisation du coefficient de neutralisation qui pour faire cohabiter dans les bases d’imposition, des valeurs locatives révisées sur les loyers de 2013 et des valeurs locatives non révisées référencées avec des loyers de 1970. Et ce, tant que la révision des valeurs locatives des locaux d’habitation – qui n’en est qu’au stade de l’expérimentation sur 5 départements – ne sera pas entrée en vigueur.
  • Écrêtement de la valeur locative, pendant 10 ans, à 50% de la différence entre la valeur locative révisée et neutralisée et la valeur locative ancienne, tant à la hausse qu’à la baisse. Ce nouveau mécanisme, appelé « planchonnement » – néologisme ô combien inventif – ne s’appliquera pas aux constructions achevées ou transformées à partir de 2017, créant de fait une inégalité fiscale, certes temporaire, mais réelle…
  • Rallongement de 5 à 10 ans (2017 à 2025) de la durée du lissage des variations de cotisations, dès le premier euro, à la hausse comme à la baisse, créant là aussi, une inégalité pour les futures constructions qui seront directement imposées sur leur juste valeur dès la première année d’imposition.

Pour l’instant, les données nécessaires pour pouvoir estimer précisément les futures taxes restent partielles. L’Administration fiscale devra les compléter par la publication des coefficients de neutralisation qui seront, pour un immeuble donné, différents selon la collectivité bénéficiaire. Elle devra également préciser les modalités d’application du « planchonnement » pour lequel la question du « dé-planchonnement » se pose. En effet, que se passera-t-il en 2026 ? La partie de valeur locative écrêtée (les 50% restant à prendre en compte) sera-t-elle imposée en une seule fois en 2026 ou faudra-t-il encore créer un autre mécanisme de lissage ?

Optimisation-CET

Néanmoins, malgré ces données incomplètes, les premières informations publiées et collectées permettent dès à présent, pour un immeuble donné ou un projet d’implantation et à partir des déclarations souscrites ou à souscrire, de répondre, cas par cas, au besoin des propriétaires et des exploitants afin d’appréhender au mieux les futures taxes révisées.

Les nouveaux critères de calcul des valeurs locatives qui serviront de base aux impôts directs locaux sont en apparence plus proches de la réalité du marché locatif. En apparence seulement car le mécanisme du « planchonnement » annihile l’intérêt de la révision. Les modalités d’application du nouveau système apparaissent, d’ores et déjà, comme relativement opaques pour le redevable. En somme, la lecture des avis d’imposition à venir devrait rester tout aussi mystérieuse qu’elle l’est aujourd’hui !

À suivre donc, de très très près…

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