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La voix des RH : Les troubles musculo-squelettiques (TMS), comment les prévenir ? – Partie 1

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Troubles musculo-squelettiques en entreprise - comment les prévenir ?

Des échanges concrets et dynamiques sur les enjeux RH, des réponses pragmatiques et novatrices apportées par des experts… découvrez « La voix des RH » notre chaîne de podcasts Ayming !

Ecouter le podcast  » la voix des RH « 

Cet épisode est animé par Daniela MARGITICAN, experte risques professionnels et Gilles SCETBON, médecin expert employeur. Après une formation en médecine générale et une expérience dans la médecine d’urgence. Gilles s’intéresse à la prévention en médecine qui l’amènera à explorer les voies de la médecine d’expertise.

Ensemble, ils abordent le sujet des troubles musculo-squelettiques (TMS) en entreprise, qui sont des pathologies multifactorielles affectant les articulations, les muscles, les tendons et les nerfs.

Ces pathologies sont liées aux postures inconfortables ou prolongées et aux contraintes biomécaniques soutenues et répétées au travail.

Elles sont responsables de la majorité des maladies professionnelles et entraînent des douleurs, des gênes fonctionnelles, une faiblesse musculaire et des troubles sensitifs.

Dans cette première partie, nous allons découvrir ce que sont les TMS :

  • Comment décrire les troubles musculo-squelettiques ? Quels sont les chiffres clés dans les TMS ?
  • Quels sont les TMS les plus fréquemment observés ?
  • Comment se manifeste ces TMS ? Comment identifier ces premiers signaux et comment les soigner ? Existe-t-il des stades différents ?
  • Quels sont les facteurs qui entrent en jeu dans la prévention des TMS ?
  • Quel rôle peut avoir la prévention des risques au sein des entreprises ?
  • Comment sont traités les TMS au sein des entreprises ? Comment-est-il possible, pour un salarié, de retrouver la pleine utilisation de ses capacités physiques ?

Bonne écoute ! 🎧

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Ecouter l’épisode 1 « La voix des RH » sur les troubles musculo-squelettiques

 

Daniela Margitican : Je suis Daniela Margitican, experte en risques professionnels et j’ai le plaisir d’accueillir le docteur Gilles Scetbon pour ce nouvel épisode de podcast. Gilles est médecin et nous allons nous intéresser aujourd’hui au sujet des troubles musculo-squelettiques en entreprise. Mais d’abord, je laisse Gilles se présenter.

Gilles Scetbon : Bonjour à toutes et à tous. Après une formation initiale en médecine générale, j’ai rapidement orienté mon activité vers la médecine d’urgence, la médecine du sport et puis je me suis fortement intéressée à la prévention en médecine. Cela m’a conduit dans un second temps et de façon progressive à venir à la médecine d’expertise dans les domaines du pénal, de l’assurance, du dommage corporel et des risques professionnels. Je consacre actuellement une partie importante de mon activité médicale globale à l’expertise et au Conseil en matière de risques professionnels au sein des miens.

 Troubles musculo-squelettiques : de quoi parle-t-on ?

Daniela Margitican : Merci Gilles. Dans le cadre de cette activité tu es amené justement à t’intéresser au sujet des troubles musculo-squelettiques en entreprise.

Je voudrais partager avec toi quelques chiffres : 87% des maladies professionnelles concernent des troubles musculo-squelettiques et elles génèrent notamment des incapacités de travail et des arrêts d’une durée relativement longue, puisqu’en moyenne, il génère 266 jours d’arrêt de travail.

On sait également qu’une partie importante de l’accidentologie est liée à des activités de manutention, qui impliquent aussi l’activité bio mécaniques.

C’est pour cela que nous avons choisi de nous intéresser à ce thème.

Dans un premier temps, j’aimerais que tu puisses nous décrire assez simplement ce que sont les troubles musculo-squelettiques.

Gilles Scetbon : Ce sont des pathologies multifactorielles, le plus souvent à composante professionnelle, qui affectent principalement : les articulations, les muscles, les tendons et leurs gaines et les nerfs.

Ces pathologies touchent anatomiquement les membres supérieurs, les membres inférieurs et la colonne vertébrale.

Généralement, ces troubles musculo-squelettiques induisent des douleurs, de l’inconfort, des gênes fonctionnelles qui peuvent aller de la perte de mobilité jusqu’au blocage articulaire, une faiblesse musculaire et des troubles sensitifs.

Cette faiblesse musculaire entraîne dans un premier temps une maladresse, mais peut aller jusqu’à une perte de force.

Ces TMS recouvrent diverses maladies qui sont liées d’une part aux postures du travail inconfortable ou prolongée et puis aux contraintes biomécaniques soutenues et répétées qui comportent des efforts excessifs, des gestes répétitifs, une exposition aux vibrations mais également au froid.

Ces troubles musculo-squelettiques surviennent la plupart du temps en milieu professionnel, mais n’inclut pas les phénomènes accidentels. Ça ne comprend donc pas les blessures qui sont la conséquence directe d’une chute, par exemple, d’un choc, d’une torsion, d’une luxation ou d’un traumatisme soudain.

L’activité professionnelle peut jouer un rôle dans la genèse, le maintien ou l’aggravation des troubles musculeux squelettiques. Pour que ces maladies ne deviennent pas chroniques, elles doivent être diagnostiquées et prises en charge précocement.

La plupart de ces troubles musculo-squelettiques sont répertoriés dans certains tableaux de maladies professionnelles :

  • Tableau 57 des maladies professionnelles pour le régime général
  • Tableau 39 pour le régime agricole.

Ces tableaux répertorient les troubles musculo-squelettiques touchant les épaules, coudes, poignets, mains, les genoux, chevilles et pieds.

  • Tableaux 97 et 98 pour le régime général
  • Tableaux 57 et 57 bis pour le régime agricole

Ces tableaux concernent les pathologies lombaires avec irradiation douloureuse dans une jambe en lien avec une hernie discale.

Les TMS les plus fréquents chez les salariés français

Daniela Margitican : Effectivement, la majeure partie des troubles musculo-squelettiques qui se manifestent vont concerner les membres supérieurs, les membres inférieurs et le dos en fonction des activités des salariés concernés.

Est-ce que tu sais quels sont les troubles musculo-squelettiques qui se manifestent le plus ou en plus grande proportion ?

Gilles Scetbon : Les tendinites occupent une place prépondérante. Voici le classement des 5 premières maladies professionnelles se manifestent le plus fréquemment chez les salariés en France :

  1. le syndrome du canal carpien, qui consiste en une compression d’un nerf à la face antérieure du poignet : 38% des maladies professionnelles
  2. Les tendinites de la coiffe des rotateurs à l’épaule : 30% des maladies professionnelles
  3. Les tendinites de la face latérale du coude, ou épicondylites latérales : 22% des maladies professionnelles
  4. Les lombalgies : 7% des maladies professionnelles,
  5. Les épanchements aux genoux, ou hygroma : 2% des maladies professionnelles.

Ces troubles musculo-squelettiques, représente 87% des maladies professionnelles tous secteurs d’activité confondus, mais cette statistique s’élève de 90 à 97% dans les secteurs du BTP, du transport et de la logistique, de l’aide et des soins à la personne, de la propreté, de l’agroalimentaire et du commerce.

Les lombalgies, quant à elles, représentent 10 à 20% des accidents de travail selon les secteurs.

Prévenir l’apparition des troubles musculo-squelettiques

Daniela Margitican : Merci Gilles pour ces quelques chiffres qui nous éclairent notamment sur le rôle des activités et dans l’apparition de ces troubles musculo-squelettiques. Mais avant d’en venir aux facteurs qui vont les faire apparaître…

Est-ce que tu peux nous expliquer comment apparaissent et évoluent ces troubles musculo-squelettiques ?

Comment peut-on voir les premiers signaux et quelles conséquences peuvent-elles avoir sur le salarié ?

Pour que les TMS ne deviennent pas chroniques, ils doivent être diagnostiqués et pris en charge précocement.

Gilles Scetbon : Pour que les TMS ne deviennent pas chroniques, ils doivent être diagnostiqués et pris en charge précocement. C’est la raison pour laquelle on définit 3 stades d’évolution des troubles musculo-squelettiques :

  1. Le premier stade et le stade de lésion bénine, il est caractérisé par des douleurs, une gêne fonctionnelle, avec une perte de mobilité, de force qui apparaissent pendant l’activité exercée. À ce stade, la lésion est bénine et consiste en une simple inflammation. La mise au repos fait disparaître les symptômes et la capacité de travail n’est pas encore altérée.
  2. Le second stade et le stade d’aggravation progressive des lésions. Des douleurs et une gêne fonctionnelle débutent de plus en plus tôt dans la journée. Les lésions inflammatoires, cicatrisent de façon fibreuse et il en découle une perte d’élasticité de ses structures. Ces symptômes ne disparaissent pas au repos et réduisent à ce stade la capacité de travail.
  3. Le stade le plus évolué est le stade au cours duquel les lésions sont devenues parfois irréversibles. Les symptômes sont plus francs, évoluent vers la chronicisation : les muscles et les tendons se fragilisent et sont exposés aux risques de rupture. S’installent alors une perte de mobilité articulaire, de force et parfois une fonte musculaire. Ils exposent le sujet à une incapacité de travail, une incapacité à poursuivre les missions habituelles du travail.

La prévention des troubles musculo-squelettiques en entreprise nécessite donc d’agir sur les facteurs favorisants. Il est donc nécessaire de connaître les causes pour participer à la prévention. Il est également nécessaire de réduire les contraintes au cours de l’activité professionnelle.

Daniela Margitican :  Je retiens dans les 3 stades d’évolution des troubles musculo-squelettiques, le premier stade, où tu nous indiques que si le salarié est rapidement identifié ou que son mal est rapidement identifié, et qu’il est mis au repos, on n’évolue pas sur des choses qui peuvent avoir des conséquences bien moins réversibles. Donc les entreprises ont tout intérêt à faire émerger ces situations avant qu’elles ne s’aggravent.

Et pour ça, justement c’est intéressant que tu puisses nous donner les facteurs qui entrent en jeu dans l’apparition de ces troubles musculo-squelettiques.

Gilles Scetbon : Alors oui, à ce stade précoce, les actions individuelles de prévention, mais également les actions collectives de prévention sont très importantes.

Sur le plan individuel, elles consistent à chercher et à optimiser la gestuelle et la posture dans tous les actes de la vie professionnelle, de la vie privée et d’agrément, c’est-à-dire au cours des loisirs. Il faut toujours rechercher les gestes les moins contraignants, les amplitudes de mouvements les plus réduites.

Une bonne gestuelle professionnelle, ça ne s'improvise pas.

Cela passe par un bon niveau de formation des salariés car une bonne gestuelle professionnelle, ça ne s’improvise pas. Une formation insuffisante des salariés les expose à un risque accru de maladies professionnelles et d’accident de travail.

Il faut donc lutter contre la sédentarité, pratiquer de l’activité physique régulière, pratiquer aussi des exercices d’échauffement et d’étirements avant une journée de travail physique, et avant une séance d’activité sportive.

D’une façon générale, il faut préserver une bonne hygiène de vie : ce qui comprend une alimentation variée, équilibrée, la maîtrise pondérale, la lutte contre la sédentarité, la gestion du temps de sommeil et puis une consommation modérée d’alcool.

Daniela Margitican : Evidemment des mesures de bon sens et pas seulement pour prévenir les troubles musculo-squelettiques en entreprise.

Tu nous donnes là quelques clés de la prévention en entreprise. Tu parles des échauffements, des étirements, ce sont des mesures qui vont contribuer à prévenir un certain nombre de lésions irréversibles.

Quel rôle de prévention ont-ils sur le corps et l’activité du salarié ?

Gilles Scetbon : Alors en entreprise, les actions collectives de prévention nécessitent l’implication de l’entreprise et de tous ces acteurs : l’employeur, les salariés, les représentants du personnel et les services de santé au travail.

Cette prévention collective au sein de l’entreprise se fait en 3 temps :

  1. D’abord, un temps de diagnostic qui permet d’identifier et de comprendre les situations à risque de troubles musculo-squelettiques en entreprise,
  2. Puis la mise en place d’un plan d’action en réduisant les contraintes, en aménageant les postes de travail, en organisant la production et en suivant les actions menées par l’entreprise pour réduire les récidives.
  3. Dans un dernier temps, il s’agit d’évaluer les mesures appliquées et les adapter si besoin.

L’échauffement et l’étirement ?  Ça consiste à conditionner le corps à subir des contraintes, des gestes répétitifs, du travail en force. Ça permet de limiter les blessures qui vont découler de ces gestes professionnels.

Le traitement des troubles musculo-squelettiques en entreprise

Daniela Margitican : Est-ce que tu peux maintenant nous donner certains éléments sur la façon dont sont traités les troubles musculo-squelettiques ?

Comment est-il possible pour le salarié de retrouver ou pas, ses capacités, notamment de travail, mais aussi ses capacités dans les activités de la vie courante ?

Gilles Scetbon : D’abord, il faut identifier les causes favorisantes pour en supprimer certaines : aménager le travail selon l’aptitude, selon la capacité restante du salarié en veillant à ne pas l’altérer.

Cette capacité restante, c’est le rôle du médecin du travail.

Il faut agir sur les activités de force, sur les gestes répétitifs, sur les postures critiques.

Il s’agit d’identifier les mouvements non douloureux pour les prioriser.

En cas d’arrêt de travail, tout doit être fait pour optimiser la reprise d’activité professionnelle, la rendre pérenne et éviter les rechutes. Cela passe parfois par des aménagements du temps de travail, mais également des missions effectuées et cela peut aller jusqu’à la nécessité de mettre en place un reclassement.

Daniela Margitican : On parle d’adapter le travail aux capacités provisoirement diminuées du collaborateur.

Giles Scetbon : Absolument, mais sur le plan de la prise en charge et sur le plan médical, et paramédical, les troubles musculo-squelettiques peuvent aussi bénéficier de traitements médicamenteux :

  • La prise d’antalgiques, anti-inflammatoires non stéroïdiens ou corticoïdes.
  • Les traitements infiltratifs.
  • La Kinésithérapie dont le rôle est majeur. Cela passe par des massages, de la physiothérapie mais également une rééducation de la posture et de l’ergonomie du geste.
  • De temps en temps, nous pouvons utiliser des orthèses pour mettre au repos une articulation douloureuse.
  • Parfois la chirurgie est indispensable mais on essaie de la limiter.
  • Les médecines dites non conventionnelles peuvent avoir un intérêt : l’ostéopathie, de la mésothérapie, de l’Acupuncture, de l’Auricule thérapie, de l’hypnose, des thérapies comportementales, mais également de l’homéopathie et de la phytothérapie.

La prise en charge médicale est généralement orchestrée autour, et par le médecin généraliste, avec un recours possible à des médecins qualifiés en rhumatologie, en médecine physique et réadaptation, en médecine du sport, en médecine antidouleur et éventuellement en médecine à exercice particulier.

Le médecin du travail peut être sollicité pour une visite de pré reprise par le salarié, par le médecin traitant, même par le médecin conseil de l’assurance maladie.

À noter que la reprise du travail après un arrêt de travail pour maladie professionnelle nécessite absolument une visite de reprise, même lorsque a eu lieu une visite de pré reprise.

Je voulais aussi aborder la question de l’automédication. Elle est problématique car le recours aux antalgiques sans avis médical masque la douleur, retarde la prise en charge et expose au risque de chronicité, isolation des lésions.

La guérison complète peut être obtenue si la prise en charge est intervenue à un stade précoce et la consolidation avec séquelle est plus fréquente lorsque la prise en charge a eu lieu au stade des lésions irréversibles.

Daniela Margitican : On revient encore une fois sur l’intérêt d’identifier rapidement les premiers signes de l’apparition d’une TMS au stade uniquement inflammatoire, douloureux comme tu le décrivais tout à l’heure.

Un autre point que je trouve intéressant dans le traitement que tu décrivais de ces lésions, souvent l’employeur méconnaît ses traitements et il peut avoir un rôle à jouer de facilitateur pour le salarié dans la prise de ces traitements, ou lorsque des rendez-vous chez le kinésithérapeute sont nécessaires. Elles ne sont pas toujours incompatibles avec la reprise d’une activité légère.

Mais pour cela, il faut vraiment que le salarié ait un interlocuteur au niveau de l’entreprise pour pouvoir ben aménager à la fois sa reprise et les conditions de ses soins.

Donc merci Gilles pour ces éclairages, c’est très intéressant.

Nous allons nous retrouver, Gilles, lors d’un prochain podcast où nous allons continuer à parler de ce sujet des troubles musculo-squelettiques en entreprise, notamment pour aborder un peu plus en détail les facteurs d’apparition et les éléments de prévention que nous pouvons mettre en œuvre.

Mais aussi un sujet qui est très actuel, qui est l’allongement de la durée de vie au travail ou plutôt de l’allongement des années travaillées et le sujet justement de la capacité de travail jusqu’à un âge plus avancé et de son lien avec les troubles musculo-squelettiques.

Merci Gilles pour ton intervention qui a été très claire et très instructive, n’hésitez pas à vous abonner, à nous suivre sur notre podcast et laissez vos commentaires.

Ecouter le podcast  » la voix des RH « 

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