Le grand plan d’investissement (GPI) d’un montant de 57 milliards d’euros pour le quinquennat a été présenté fin septembre par le premier ministre, Edouard Philippe.
Ce plan repose sur un rapport élaboré par Jean Pisani-Ferry. Il tourne autour de 4 défis majeurs : la neutralité carbone, l’accès à l’emploi, la compétitivité par l’innovation et l’État numérique.
La notion d’investissement
Le rapport souligne le fait que la France ne manque pas d’investissement public : « Contrairement à l’Allemagne, [la France] n’a pas coupé dans les dépenses d’infrastructure pour équilibrer ses comptes. L’allocation de l’investissement fait certainement question, pas son niveau » (p.23).
En revanche, il faut investir mieux et adopter une autre approche de la notion d’investissement : « le critère de l’investissement ne doit pas être la nature de la dépense, mais son caractère transformant et son utilité au regard d’objectifs de long terme bien définis ». Par exemple font parties des dépenses d’investissements « les actions de formation, les dépenses de soutien à la transition écologique, les aides à la mobilité des agents publics, les dépenses de réorganisation des institutions » (p.23).
Quels moyens financiers pour le GPI ?
Le plan d’investissement poursuit quatre finalités :
- Accélérer la transition écologique : 20 milliards d’euros
- Édifier une société de compétences : 15 milliards d’euros
- Ancrer la compétitivité sur l’innovation : 13 milliards d’euros
- Construire l’État de l’âge numérique : 9 milliards.
Le plan d’investissement sera mis en œuvre à partir de 2018.
Comment sera financé le GPI ?
Le plan d’investissement repose sur quatre sources de financement :
- 11 milliards proviennent des instruments financiers (prêts, garanties, fonds propres)
- 12,1 milliards proviennent de la réorientation de crédits existants vers les finalités du plan d’investissement
- 24 milliards, des mesures nouvelles
- 10 milliards de l’intégration du PIA 3 dont 6 milliards de subventions et 4 milliards de fonds propres.
Comment sera gouverné le GPI ?
Les moyens du plan d’investissement seront inscrits dans les crédits des ministères qui devront rendre compte des résultats obtenus au regard d’indicateurs correspondant aux objectifs des actions qu’ils conduiront.
L’ensemble du plan d’investissement sera sanctuarisé, mais des réallocations en son sein interviendront annuellement en fonction des résultats obtenus. Un minimum de 3 % des crédits fera chaque année l’objet d’une réallocation.
Le secrétariat du plan d’investissement devra être assuré par une structure légère prenant appui sur l’actuel Commissariat Général à l’Investissement dont le fonctionnement sera rénové.
Le secrétariat du plan d’investissement aura pour missions de :
- Coordonner les activités des comités de pilotage thématiques qui lui fourniront des bilans réguliers ;
- De proposer des réallocations en fonction des résultats observés.
Un conseil de surveillance, garant de l’esprit du GPI, sera mis en place. Composé pour moitié de personnalités qualifiées choisies pour leur compétence sur les trois thèmes du GPI, il pourrait être présidé par une personnalité internationale.
Une instance de dialogue avec les collectivités territoriales, les partenaires sociaux et d’autres partenaires de la société civile sera réunie de façon périodique.
20,1 milliards pour la transition écologique
Les 20,1 milliards d’euros s’articuleront autour de trois priorités :
- Accélérer la rénovation thermique des bâtiments, responsables de 20 % des émissions de gaz à effet de serre et de plus de la moitié de la consommation finale d’énergie ;
Cette priorité couvre les bâtiments publics de l’Etat, la rénovation thermique et l’efficacité énergétique des bâtiments des collectivités territoriales, les bâtiments des organismes de logements sociaux. Est aussi concerné le programme « habiter mieux » de l’ANAH afin d’aider les propriétaires les plus modestes à rénover leur logement.
- Soutenir le développement d’une politique de transports durables ;
Cette priorité couvre la mise en place d’une prime à la conversion automobile, la rénovation du réseau routier, du réseau ferré ; le soutien au développement de transports plus propres, le développement de nouveaux services de proximité et d’interconnexion des territoires en développant des plateformes de mobilité et des aménagements cyclables (…)
- Contribuer à l’émergence des nouveaux modèles de développement et à la transformation des habitudes des citoyens et des entreprises.
Sont évoqués l’augmentation de la production d’énergie renouvelable, le développement de projets très innovants dans la transition énergétique permettant de démontrer l’intérêt commercial d’une technologie, la recherche de pointe sur les mobilités de demain, les nouveaux modèles urbains et enfin les actions de l’ADEME pour le développement du fonds chaleur, du fonds qualité de l’air et l’accompagnement des TPE/PME pour optimiser leurs flux matière-énergie-déchets-eau.
Spécificité pour les PME : la lutte contre le gaspillage
Pour les PME, la réduction du gaspillage correspondrait à un potentiel d’économies de près de 1 milliard d’euros.
Un programme de lutte centré sur l’identification, par des audits externes dans des PME, d’actions d’optimisation des flux présentant une rentabilité inférieure à un an sera ainsi financé.
Les audits seront gratuits. Cependant, conformément à un contrat qui sera passé avec l’entreprise, les économies réalisées grâce aux diagnostics des experts rembourseront a posteriori l’audit.
En 2019, une première phase d’expérimentation sera lancée avec un objectif de 500 PME. En fonction des résultats, le dispositif sera généralisé, avec un objectif de 5 000 PME accompagnées d’ici 2022.
Ce mécanisme devrait s’autofinancer avec les remboursements réalisés avec les économies constatées.
Un soutien renforcé à l’innovation et aux filières d’excellence
Pour l’innovation plusieurs orientations sont fixées en particulier celles de soutenir la prise de risque et la croissance d’entreprises innovantes dans les secteurs émergents, comme l’intelligence artificielle, l’exploitation des mégadonnées ou la cybersécurité et d’accompagner la transformation de secteurs en mutation et l’évolution des modèles économiques (en matière de transition énergétique, de santé, de nouvelles mobilités…).
La filière aéronautique bénéficiera également du soutien public.
La transformation des filières agricoles et agroalimentaires comme l’agriculture, la pêche, l’agroalimentaire, le secteur forêt-bois sont particulièrement visés avec :
- L’adaptation des outils et le changement des pratiques,
- Le développement de la bioéconomie,
- Le renforcement des entreprises de l’aval des filières,
- Et le soutien à la recherche et à l’innovation.
Le GPI a plusieurs priorités parmi lesquelles la réponse aux défis du changement climatique qui nécessitera d’accompagner l’adaptation des systèmes de production et l’optimisation de la gestion de l’eau, le développement de la bioéconomie, la production d’énergies renouvelables (biomasse agricole, biomasse forestière) ou encore le renforcement des puits de carbone en forêt et la séquestration du carbone dans les sols agricoles ;
Il est également question de renforcer le soutien à la recherche et à l’innovation, notamment dans les domaines de la bio-économie, de l’agriculture numérique, du bio-contrôle, de la génétique, des biotechnologies et de l’innovation ouverte.
Le total des investissements dans les secteurs agricole, pêche, agroalimentaire et forêt-bois pourrait s’élever à 5 milliards d’euros sur la durée du quinquennat.
Les domaines émergents
- L’intelligence artificielle
- L’exploitation des mégadonnées
- La cybersécurité
- La bioéconomie
- La production d’énergies renouvelables.
Quid de la sphère publique ?
Gouvernement poursuit trois objectifs prioritaires dans le cadre du chantier Action publique 2022 :
- L’amélioration de la qualité et l’accessibilité des services publics, en accélérant leur transformation numérique
- La modernisation de l’environnement de travail des agents publics
- La baisse des dépenses publiques.
A noter qu’un fonds pour la transformation publique doté de 700 millions d’euros sera créé. Il financera, sur la base d’appels à projet auprès des Ministères et de leurs opérateurs, les coûts d’investissement au sens large (systèmes d’information, formation, frais de mise en place de nouveaux systèmes, coûts de réorganisation) nécessaires à la mise en œuvre de réformes structurelles, à fort potentiel d’amélioration du service et de réduction durable des dépenses publiques (un euro d’économies annuelles par euro investi à horizon de trois ans).
Formation
Le GPI comprend un pan très important consacré à la formation et au développement des compétences.
Sont particulièrement visés les jeunes décrocheurs, les demandeurs d’emploi les plus éloignés du marché du travail, la rénovation du premier cycle universitaire ou bien encore les expérimentations portées par l’éducation nationale.
(1) En innovation, le concept de « Vallée de la mort » représente la transition difficile entre la phase de recherche et la phase de commercialisation, déterminée principalement par les ressources financières seulement allouées aux meilleurs projets. Par extrapolation, dans le domaine de la créativité, le ratio entre la quantité, la qualité et la sélection des idées est représenté par le même cheminement.
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